OCCASION - GRAND FORMAT
 
Résumé
Un « fourre-tout », un « chaos redoutable »... La plupart des auteurs se lançant dans
une histoire du music-hall et se rendant compte du guêpier où ils se sont fourrés se
bardent de précautions à l'égard de leurs lecteurs. Ils alignent des justifications issues
de valeureux prédécesseurs, telles que : « Il ne saurait être question de répartir de force
la complexité infinie du music-hall entre les cloisons rigides d'un classement théorique
souvent mis en défaut par la réalité des choses. » Autrement dit, si vous entrouvrez le
rideau rouge d'un music-hall mythique, vous apercevez sur scène une telle accumulation
de décors et de personnages en tous genres et de toutes époques, ayant entre eux toutes
sortes d'affinités, d'ascendances et aussi, bien sûr, de contradictions, que vos intentions
chronologiques battent de l'aile. Et, au moment où vous souhaitez refermer ce rideau
imprudemment approché, il se dégage d'entre vos doigts : il n'existe plus, renié par les
derniers servants du culte !

L'ogre music-hall, c'est vrai, a, dès sa naissance officielle (elle-même précédée de
multiples petits bâtards...), absorbé l'essentiel de ce que les autres formes de spectacles
proposaient. Voilà bien pourquoi, d'ailleurs, le terme générique de variétés aurait mieux
correspondu à sa fonction. On y trouve donc, totalement imbriquées, des participations
de chanson, de cirque, de théâtre, de spectacles de foire. En outre, à l'intérieur même de
chacune de ces spécialités, la variété prolifère. Ainsi peut-on, par exemple, scinder en
deux courants d'origine différente les composantes du chapitre chanson, selon que
celle-ci émane du populaire café-concert ou des cabarets, plus élitistes. Il arrive aussi que
certains numéros relèvent de plusieurs disciplines et que d'autres soient proprement
inclassables. Le tout est, évidemment, lié, plus ou moins, aux influences historiques et
aux modes, selon que les artistes les acceptent ou les contrecarrent...

Un récit strictement chronologique n'aboutirait qu'à un mélange indigeste, avec de
tels recoupements d'artistes et de créateurs, d'une année et d'un établissement à l'autre,
que le lecteur se lasserait vite. Nous avons donc adopté ce « classement théorique », très
justement décrié par d'excellents confrères, amoureux des variétés... comme nous.
Quelques brefs retours en arrière, au début de certains chapitres, seront le seul prix de
cette clarification un peu sacrilège dans un monde où l'illusion brouille à plaisir les
cartes de la réalité.

A.S.